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Camp de la transportation

Camp de la transportation

Il est temps de dire au revoir à Cayenne et mes super mega hôtes, comme ici tous les prix sont aussi élevés qu’en France (mais pas les salaires !) continuer en bus aurait encore coûté une fortune, Sylvain me dépose à un embranchement de route, car aujourd’hui, je vais tenter le stop. Ça marche plutôt bien ici, un peu trop même, car on se retrouve souvent à 5, 10 , 20 gars à tendre le pousse au même endroit !
Mais là je suis seul, je remercie chaleureusement mon chauffeur/hébergeur/guide/nouvel ami, pour tendre le bras, et avec le sourire. Il faudra presque une heure pour que quelqu’un me prenne, c’est à la frontière avec le Suriname que je souhaite me rendre, à Saint-Laurent-du-Maroni pour être exacte. Ce premier véhicule me laissera à Kourou, ou j’étais la veille, maintenant cela va se corser, nous sommes déjà 4, et au bout d’une heure, 6. Des voitures passent, mais personne ne s’arrête. Nous voilà maintenant à 10, on dirait qu’ils se sont tous passés le mot « Et si on faisait du stop à cet endroit, à cette heure précise ? », cela me gonfle un peu alors, sacs sur le dos, je marche le long de la route, il fait chaud et humide, mais il est nécessaire de prendre des distances, au bout de 2km, je suis seul, loin du rond point, mais seul. Personne ne s’arrête, ils me font tous un signe pour dire qu’ils vont bientôt tourner, ok, ok…
Je ne lâche pas, et continue à sourire, mieux, je les salue quand ils me passent.
Après 3 heures d’attente (oui 3 !) une voiture s’arrête, le problème c’est qu’elle est dans le sens opposé :
– « Allez monte »
– « Euh merci, mais je vais dans l’autre direction »
– « Ah non, mais moi aussi »
– « Ben… Pourquoi vous allez vers Kourou alors ? »
– « En fait je suis passé devant toi il y a 30 secondes, et j’ai fait demi-tour pour venir te chercher »
– « Ah oui ? Ben c’est super sympa ça ! »
– « Oui, je me suis dit ‘pourquoi ne pas le prendre ?’ tu avais l’air sympathique »
– « Ben écoutez, merci beaucoup »
– « Tu vas où ? »
– « Saint-Laurent »
– « Ha ! Moi aussi, ça tombe bien »
À ce moment là, je savais que je n’aurais plus à chercher de transport, quel soulagement, je ne me voyais pas tendre le pouce toute la nuit…
Sur le chemin on s’arrête quelques minutes à Iracoubo, cela tombait bien il y avait une église ici que je souhaitais découvrir, l’église Saint-Joseph et ses fresques intérieures, toutes réalisées fin du 19ème siècle par un bagnard du nom de Pierre Huguet.

Dans la voiture j’ai amené de quoi manger, et le contraste est très prononcé entre les Sispas :

Tradition local, manioc, sucre et noix de coco râpée. Et …des Figolu :

Ben quoi ? Vous savez ça fait combien d’années que j’en avais pas mangé ? Mieux, combien d’année que j’en avais pas aperçu ? La réponse est …beaucoup…
Mes acolytes m’avaient laissé entre de bonnes mains, ils avaient une connaissance à Saint-Laurent et elle avait accepté de me donner un toit pour deux nuits.
Ici tout est différent, c’est moins « francisé », et beaucoup d’ethnies y cohabitent, mais aussi des étrangers du Suriname et du Brésil. Je ne vais pas vous faire un topo de la situation sur place, malgré toutes mes discutions avec les ‘metro’ et locaux, je ne peux pas donner une opinion en seulement 3 jours.
En revanche je peux vous faire visiter, virtuellement, un monument, triste monument de la ville, son bagne.
Le bagne de Saint-Laurent, ou Camp de la Transportation, était un établissement pénitentiaire créé fin du 18ème siècle, mais qui prit sont « rythme » en milieu du 19ème.
Les prisonniers venaient par bateaux de France métropolitaine, les conditions de voyages étaient tellement rustiques qu’un gros pourcentage mourraient pendant le voyage.

La visite se fait avec un guide, et ce jour là, j’étais seul, donc le guide rien que pour moi !

Ce bagne était pour la plupart des condamnés provisoire, c’était ici qu’ils arrivaient, mais étaient très vite envoyés dans les autre camps du pays.
Bien sûr les conditions étaient dures, le confort inexistant, mais surtout la maladie très présente.
Il y avait deux sorte de cellules, celles à plusieurs :

Pour info, ces deux longs morceaux de béton étaient leur …lit. Et la barre en métal, servait à les attacher par le pied.

Puis pour ceux qui restaient, des cellules individuelles :

On peut encore y observer les gravures sur les murs faites par les prisonniers, celles pour compter le temps qui passe :

Celles pour faire rêver :

Celles pour dire au revoir :

Puis celles qui indique un nom, ou surnom du prisonnier, fier d’être passé par là, en tous cas le guide est très heureux de me montrer cette gravure, « Regarde là-bas dessous », « Qu’est-ce que tu lis ? » :

– « Euh… Papillon ? »
– « Oui ! Formidable non ?! »
– « Euh… Pourquoi ? »
– « C’était la cellule de Papillon ! »
– « Il était connu ? »
– « Tu te moques de moi ? »
Ben en fait non, je ne me moquais pas de lui, j’étais juste un peu ignorant, ou inculte, comme vous voulez.
Papillon est le surnom d’un bagnard célèbre, Henri Charrière, pour ses aventures et tentatives d’évasion, célèbre oui, car un livre a été écrit, avec un succès immense en début des années 70, tellement immense qu’une version cinématographique hollywoodienne a été produite en 1973 avec Steve McQueen et Dustin Hoffman, ce n’est pas rien ! Pourtant, je n’en avais aucune idée…
Aujourd’hui le temps est médiocre, mais quand même chaud, ce qui facilite l’imagination, très aisé de se mettre à leur place, surtout avec des images comme celles-ci :

Coussin
Attache pied…

Pourtant le pire à imaginer, ce sont les moustiques, ils devaient se faire bouffer jour et nuit, une gène et douleur incessante, une vague épuisante qui devaient largement leur taper sur le système.
Ils avaient le droit de se laver, à l’eau, une fois par mois.
Beaucoup sont décédés de maladies, manque d’hygiène et aussi, de désespoir.

La cuisine :

À l’entrée, des photos, les clichés cela ne ment pas, cela rend immédiatement le lieu réel, toutes ces vies qui sont passées par ces murs, l’émotion fera évidemment aussi partie de la visite

Comme d’habitude pour ce genre de découverte, je sors de là un peu déboussolé, mais avec une pièce de plus sur l’histoire de France (pas la plus glorieuse…).
Demain je quitte la Guyane, j’ai des opinions mitigées sur ce département, il faudrait rester (beaucoup) plus longtemps pour se faire une idée d’ensemble, mais pour ce que j’en ai vu, rien ne me retient ici, je vais continuer à suivre mes envies et choisir de ne pas y passer plus de temps, pour être franc, il me tarde de passer à autre chose.
J’ai un vol pour Trinité-et-Tobago, pas de Guyane (bien trop cher !) mais du Suriname, Suriname vous connaissez ?
Pour moi en tous cas, c’est un mystère, mais je vous raconte ça dans le prochain article.

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